LA VILLE

Voyager, c’est d’abord s’y perdre, rencontrer, sans les maîtriser, les dédales de La Ville. Quel délice ! Évitant les Offices, se perdre dans les faubourgs de Florence, traîner dans des rues incertaines, gagner les collines, comme Gide le fit. Déjeuner là, surplomber la ville, l’appréhender un peu…, enfin, de l’extérieur, du dessus, qui est la seule manière de l’appréhender un peu.

AU PASSAGE… STRASBOURG [ANDRÉ GIDE]

Ô “folle cathédrale !” — avec ta tour aérienne ! — du sommet de ta tour, comme d’une nacelle balancée, on voyait sur les toits les cigognes
orthodoxes et compassées
avec leur longues pattes,
lentement — parce que c’est très difficile de s’en servir.

POST-CURE [TRAIN DE NUIT]

La voici seule, dans la lumière sale de la gare, dans la vague agitation du départ nocturne, ma voisine. Maigre, pâle, défaite, désemparée, prête désespérément à partir. La famille a fondu sans remord dans la nuit. Sifflement. On est prié d’embarquer.

D’UN MONOLOGUE DE JOSEPH B. À SAINT-FLORENT EN CORSE [KENNETH WHITE]

Assis à un café du bord de mer de Saint-Florent, j’ai regardé le soleil descendre sur le désert des Agriates, et le ciel se colorer de rose, puis de pourpre.
C’est là que je suis entré en conversation avec Joseph Bastianelli, ou plus exactement que j’ai écouté son monologue.

D’UN LIVRE-ITINÉRAIRE [KENNETH WHITE]

J’ai sans doute les notions de « confins, marges, limites » et de « passage, itinéraire, chemin » inscrites dans la matière grise de mon cerveau, peut-être même dans la moelle de mes os. Ce n’est pas seulement une question de géographie, c’est une question de paysage mental.

FESTINA LENTE [OCTAVIAN PALER]

Festina lente ? Qui a dit cela ? Ah, oui, j’ai appris, dans la nuit des temps, au cours de latin, que les poètes conseillaient aux Romains de se hâter lentement, au contraire des soldats qui faisaient trépider les voies impériales… Mais à quoi bon se souvenir de dictons périmés ? Ils sont comme la valse sur ce bateau. Quoique ce serait une bonne plaisanterie si, dans les gares et aérogares, au lieu d’annoncer les trains et les avions qui viennent et partent, on répétait chaque fois ces deux mots festina lente, plus lentement, par syllabes, puis plus rapidement, jusqu’à ce qu’on ne comprenne plus rien.

EXCENTRIC-NEWS